Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/66

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des vitesses linéaires, supérieures à celles des couches plus rapprochées du centre, et la condensation de l’anneau aurait donné lieu à des satellites directs (et à une rotation directe de la planète). Il est facile de montrer que cette manière de voir n’est pas tout à fait exacte (comme preuve de fait, il suffira de citer les anneaux de Saturne). Les couches d’une atmosphère pèsent les unes sur les autres ; de plus, les couches extérieures ne résistent que par leur inertie à la communication du mouvement rotatoire, qui tend à s’établir entre le globe central et les couches extrêmes de son atmosphère. Mais, dans un anneau nébuleux, les couches concentriques ne pèsent pas les unes sur les autres comme dans une atmosphère, car elles circulent chacune en vertu de la vitesse propre à sa distance au Soleil. De plus, le retard des couches situées près du bord extérieur sur les couches, internes ne tient pas à leur inertie, mais aux lois mêmes de leur mouvement. Si donc le système solaire avait été formé conformément à l’hypothèse de notre grand géomètre, toutes les planètes circuleraient bien autour du Soleil dans le sens direct, mais leurs rotations et leurs satellites seraient rétrogrades ». « Dès lors, ajoute M. Faye, l’hypothèse cosmogonique de Laplace, fondée sur une erreur de théorie mise en pleine évidence par les faits, est inacceptable » (Sur l’Origine du Monde, p. 135).

L’objection de M. Faye peut paraître légitime, appliquée aux anneaux tels que les conçoit Laplace. Pour lui, les zones de vapeurs, successivement abandonnées, forment les anneaux par leur condensation et l’attraction mutuelle de leurs molécules. Chaque zone a donc bien sa vitesse linéaire propre, moindre pour les plus extérieures, plus grande pour les intérieures. Laplace admet que, lorsqu’elles se réunissent pour former un anneau, ces zones égalisent en même temps leurs vitesses angulaires, par le frottement mutuel de leurs molécules.

C’est cette égalisation que M. Faye ne veut pas admettre, parce que les diverses couches ne pressent pas les unes sur les autres. Cependant, dès que l’on suppose avec Laplace que l’attraction mutuelle de leurs molécules suffit pour constituer un anneau par la réunion de plusieurs zones, il semble difficile de se refuser à croire qu’elle ne puisse suffire, aidée des frottements intérieurs, à produire et maintenir l’égalité de vitesse angulaire. Ainsi consi-