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et l’ingénieuse explication de la formation des anneaux que nous devons à M. Roche font disparaître entièrement l’objection de M. Faye.

Mais on peut aller plus loin. Admettons avec M. Faye que la nébuleuse planétaire, formée par la condensation de l’anneau, ait eu à l’origine un mouvement de rotation rétrograde ; ce mouvement ne pourra persister. En effet, dans la première période de son existence, cette nébuleuse, sous l’action attractive de la masse centrale, est soumise à une puissante marée qui l’allonge en forme d’ellipsoïde dont le grand axe est constamment dirigé vers le centre du système. De là, au bout d’un temps relativement court, l’établissement d’une égalité parfaite entre les durées des mouvements de révolution et de rotation, et par conséquent déjà une rotation directe. Par le progrès de la condensation, la vitesse de rotation augmente et la marée diminue. Mais, au moment où l’égalité cesse, la vitesse orbitale des parties les plus extérieures est plus grande, et la vitesse orbitale des parties intérieures moindre que celle du centre de la nébuleuse planétaire. Le sens du mouvement de rotation est donc nécessairement direct, qu’elles qu’aient été les conditions primitives. Cette remarque importante, dont j’emprunte le principe à M. Roche et à M. Daniel Kirkwood [On certain harmonies of the solar system (Silliman’s Amer. Journal of Science and Arts, 2e série, t. XXXVIII, p. 3)], s’applique certainement aux planètes les plus voisines du Soleil. Tout au plus pourrait-on en contester l’exactitude quant aux planètes très éloignées, comme Uranus et Neptune. Cette dernière pourrait donc avoir, même dans l’hypothèse de Laplace, en admettant l’objection de M. Faye, un mouvement rétrograde : c’est là un point important, sur lequel nous aurons à revenir. Mais, pour les planètes moins éloignées du Soleil, l’objection de M. Faye me paraît complètement écartée ; quel qu’ait été à l’origine le sens de la rotation de la nébulosité, la planète qui en est sortie a nécessairement, une fois formée, la rotation directe[1].

  1. Le principe de ce théorème doit en réalité être attribué à Laplace. C’est en effet par les marées produites sur la Lune par la Terre et sur les satellites en général par leur planète, que Laplace explique l’égalité des périodes de révolution et de rotation de ces corps. Une fois cette égalité établie, le mouvement est nécessairement direct. Ainsi se vérifie l’assertion que j’ai émise précédemment (p. 20)