Page:Wyzewa - Un miracle, paru dans Le Figaro, 07, 08 et 09 mai 1890.djvu/16

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Elle s’approcha de la petite étagère où elle avait mis ses livres. Elle n’avait apporté que des Christmas Books, des histoires d’enfants, la seule littérature qu’elle aimait. Elle se reprocha ce goût ridicule, songeant qu’il lui venait d’un temps où la vie lui était encore si sottement souriante. Comme elle aurait été une bonne mère et quels beaux enfants elle aurait eus ! Elle ouvrit un livre, un autre, les referma. Elle se demandait ce que pouvait faire à présent sa sœur avec John Morris : sans doute ils étaient à prendre le thé chez les vieilles demoiselles, et il écoutait Nelly bavarder, la comparait à sa sœur cadette qui était décidément trop laide. Et puis pourquoi, dans tous ces romans de Mistress Mollosworth, les jeunes étaient-elles jolies ? De celles-là elle était jalouse. Elle aussi aurait su se gagner l’amour d’un jeune seigneur, si elle avait eu des cheveux d’un blond plus tendre et une taille plus fine.

T. DE WYZEWA.

(La suite à demain.)