rait avantageux à vous de me confier ce pouvoir, à moi de l’accepter. Les dieux m’ont fait voir dans les victimes, si clairement qu’un enfant n’aurait pu s’y méprendre, que je dois m’abstenir de ce pouvoir absolu. »
On élit Chirisophe. Chirisophe, une fois élu, s’avance et dit : « Sachez, soldats, que je me serais soumis, si vous aviez élu un autre chef, mais vous avez rendu service à Xénophon en ne l’élisant pas. Dexippe l’a depuis peu calomnié auprès d’Anaxibius, autant qu’il l’a pu, quoique j’aie fait tous mes efforts pour lui fermer la bouche. Il a dit qu’à croyait que Xénophon aimerait mieux avoir pour collègue Timasion de Dardanie, de la division de Cléarque, que lui-même qui est Lacédémonien. Mais puisque vous m’avez élu, continue Chirisophe, je m’efforcerai aussi de vous faire tout le bien que je pourrai. Préparez-vous à lever l’ancre, demain, si le temps est beau. On fera voile vers Héraclée ; il faut que tout le monde tâche d’y arriver : une fois là, nous aviserons au reste. »
CHAPITRE II.
Le lendemain, on met à la voile par un bon vent, et pendant deux jours on navigue, à l’aide du câble, le long des côtes. En longeant la terre on aperçoit le cap Jason, où aborda, dit-on, le navire Argo, et les bouches de plusieurs fleures, d’abord du Thermodon, ensuite de l’Iris, puis de l’Halys[1], enfin du Parthénius. Cette embouchure passée, on arrive à Héraclée, ville grecque, colonie de Mégare, située dans le pays des Mariandyns. On mouille près de la Chersonèse Achérusiade. C’est là, dit-on, qu’Hercule descendit aux enfers pour enchaîner Cerbère : on montre encore à présent, comme monument de sa descente, un gouffre qui a plus de deux stades de profondeur. Les Héracléotes envoient aux Grecs, en présents hospitaliers, trois mille médimnes de farine d’orge, deux mille cérames de
- ↑ Le Thermodon est le Thenneh actuel. L’Iris se nomme aujourd’hui Iekil-Irmak, et l’Halys Kizyl-Ermak.