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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/150

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Suivez vos chefs, et donnez toute votre attention à bien exécuter leurs ordres. »

Cela dit, il se place en tête. La cavalerie, se dispersant autant qu’elle le peut sans risque, brûle tout ce qu’elle rencontre, et les peltastes, occupant successivement les hauteurs, mettent le feu à tout ce qui est combustible : le reste de l’armée achève de détruire ce qui a échappé : de cette manière le pays tout en feu annonce la marche d’une nombreuse armée. L’heure étant venue, les Grecs montent et campent sur une colline, d’où ils aperçoivent les feux de l’ennemi, à la distance d’environ quarante stades, et ils allument eux-mêmes le plus de feux possible. Le repas fini, on ordonne d’éteindre ces feux au plus vite ; on place des sentinelles pour la nuit, et l’on se livre au repos. Au point du jour, on adresse des prières aux dieux, on se range en bataille et l’on s’avance au pas accéléré. Timasion, qui avait pris les devants avec la cavalerie et les guides, se trouve, sans le savoir, sur la colline où les Grecs étaient assiégés. Il n’y voit plus ni amis, ni ennemis, et il en instruit aussitôt Xénophon et sa troupe. Il ne restait que quelques vieilles femmes, des vieillards, quelques chétifs moutons et des bœufs abandonnés. On s’étonne d’abord, on se demande ce qui peut être arrivé. On apprend ensuite de ceux qu’on a laissés là que les Thraces se sont retirés, tous dès le soir même, et ils ajoutent que les Grecs sont partis le lendemain ; mais de quel côté, ils ne le savent pas.

Ces renseignements connus, Xénophon fait dîner les troupes ; on plie bagage, et l’on se remet en marche dans le dessein de rejoindre au plus tôt les autres Grecs au port de Calpé. Chemin faisant, on trouve la trace des Arcadiens et des Achéens sur la route du port de Calpé. Quand on les a rejoints, on se revoit avec bonheur et l’on s’embrasse comme frères. Les Arcadiens demandent aux soldats de Xénophon pourquoi ils ont éteint leurs feux : « Nous croyions, disent-ils, en ne voyant plus vos feux, que vous alliez attaquer les ennemis la nuit même : ceux-ci, nous le présumons, ont eu également cette idée, et la crainte les a fait décamper ; car c’est vers ce moment qu’ils ont battu en retraite. Comme vous n’arriviez point et que le temps nécessaire était écoulé, nous avons cru qu’instruits de notre situation et enrayés vous vous étiez retirés vers la mer. Nous avons jugé nécessaire de ne pas rester en arrière de vous, et c’est comme cela que nous avons marché jusqu’ici. »