Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/189

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plus considérable parmi les Odryses, qui étaient descendus de leurs montagnes et s’étaient joints à Seuthès. Il s’avance et appelle Xénophon hors du cantonnement des Grecs. Xénophon, prenant avec lui quelques lochages et d’autres personnes affidées, s’approche de Médosade. Alors celui-ci : « Vous nous faites tort, Xénophon, dit-il, en ravageant nos villages. Nous vous annonçons donc, moi, de la part de Seuthès, et cet homme de la part de Médocus, roi du haut pays, que vous ayez à évacuer notre contrée ; sinon, nous ne vous laisserons pas faire ; et, si vous ravagez nos terres, nous vous repousserons comme des ennemis. »

Xénophon après l’avoir entendu : « Tu viens de nous dire des choses auxquelles il est fâcheux de répondre ; je le ferai cependant pour que ce jeune homme sache qui vous êtes et qui nous sommes. Avant de devenir vos amis, nous traversions ce pays comme nous le voulions ; nous pillions où il nous plaisait, nous brûlions à notre gré. Et toi, quand tu es venu vers nous en envoyé, tu as campé au milieu de nous, sans rien avoir à craindre des ennemis. Vous ne pouviez entrer dans cette contrée, ou, si vous y entriez, vous y campiez comme en pays d’ennemis plus forts, vos chevaux toujours bridés. Maintenant que vous êtes nos amis, et que, grâce à nous, vous possédez cette contrée, vous nous chassez d’un pays dont vous n’êtes maîtres, que par nous. Tu le sais bien toi-même, les ennemis n’étaient pas capables de nous en faire sortir. Et ce n’est pas en nous faisant des présents, en nous traitant bien, pour reconnaître nos services, que tu prétends nous chasser ; tu veux, autant qu’il est en toi, nous empêcher même de cantonner. En parlant ainsi, tu ne rougis pas devant les dieux, devant ce jeune homme qui te voit maintenant dans la richesse, toi qui, avant d’être notre ami, ne vivais que de maraude, comme tu nous l’as avoué. Mais pourquoi me dis-tu cela ? Je ne commande plus ici, mais vous vous êtes livrés aux Lacédémoniens pour conduire votre armée et vous ne m’avez pas appelé au conseil, hommes étonnants que vous êtes ; comme je les ai fâchés en vous amenant l’armée, vous craigniez que je ne leur fisse plaisir en la leur ramenant aujourd’hui. »

Lorsque l’Odryse eut entendu ces mots, il dit : « Pour moi, Médosade, je voudrais être enfoui sous terre, de la honte que j’ai en entendant cela. Si je l’avais su d’avance, je ne t’aurais pas accompagné : je m’en vais. Le roi Médocus ne m’approuverait pas de chasser nos bienfaiteurs. » Cela dit, il saute à cheval.