Aller au contenu

Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il était temps de songer à faire retraite : on prend tout ce qu’il y a de bœufs et de menu bétail, et on l’emmène avec les esclaves, en formant une colonne à centre vide ; ce n’était pas qu’on eût l’esprit au butin, mais la retraite aurait eu l’air d’une fuite, si l’on se fût retiré les mains vides, ce qui aurait augmenté l’ardeur des ennemis et le découragement des Grecs. On se retire donc en-gens, qui se battent pour défendre leur bien. Gongylus apercevant les Grecs en petit nombre, pressés par de nombreux ennemis, sort, malgré sa mère, avec sa troupe, pour prendre part à l’action. Proclès, descendant de Démarate, amène aussi des renforts d’Halisarne et de Teutbranie. La troupe de Xénophon, écrasée par les flèches et les pierres, marche en rond pour opposer les armes aux traits, et repasse à grand peine le Caïque ; la moitié presque sont blessés, entre autres Agasias de Stymphale, un des lochages, qui, en tout temps, s’était battu avec courage contre les ennemis. Enfin les Grecs sont hors de danger, conservant environ deux cents prisonniers, et assez de menu bétail pour offrir des victimes.

Le lendemain, Xénophon, après avoir fait un sacrifice, fait marcher de nuit toute l’armée le plus loin possible dans la Lydie, afin qu’Asidate ne craigne plus son voisinage et néglige de se garder. Or, Asidate, entendant dire que Xénophon a fait de nouveaux sacrifices et qu’il doit l’attaquer avec toute son armée, va se cantonner dans les villages contigus aux murailles de Parthénium. Il y tourne dans les troupes de Xénophon, qui le prennent avec sa femme, ses enfants, ses chevaux et tout ce qu’il possède[1]. Ainsi fut accomplie la première prédiction des victimes. De là les Grecs se retirent à Pergame, et Xénophon n’a point à se plaindre du dieu, car les Lacédémoniens, les lochages, les autres stratèges et les soldats conviennent de lui donner l’élite du butin, chevaux, attelages et le reste : en sorte qu’il se trouve même en état d’en obliger d’autres.

Sur ces entrefaites, Thimbron arrive, prend le commandement de l’armée, l’incorpore aux autres troupes grecques, et va faire la guerre à Tissapherne et à Pharnabaze.

Voici les noms des gouverneurs des pays du roi que traversa notre armée : en Lydie, Artimas ; en Phrygie, Artacamas ;

  1. « Ce fait, qui ressemble plus à une attaque qu’à une expédition militaire, et sur lequel on regrette que Xénophon s’étende d’une manière si peu digne d’un homme de guerre tel que lui peut donner une idée de la facilité avec laquelle l’ennemi, même le plus faible, pouvait faire impunément irruption dans l’empire perse. » L. Dubeux.