Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/206

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ou privées. Ils prononcent les arrêts de mort, et choisissent toutes les autorités. Si quelqu’un des adolescents ou des hommes faits a manqué aux devoirs prescrits par la loi, les phylarques, ou quiconque le veut, se chargent de l’accusation. Les vieillards, après audition, dégradent le coupable, et l’homme ainsi dégradé demeure infâme le reste de sa vie.

Mais afin de mieux faire comprendre tout le gouvernement des Perses, je reprends d’un peu plus haut, ce peu de paroles suffisant pour être clair d’après ce qui a été dit. On dit que les Perses ne sont pas plus de douze myriades[1]. Pas un d’eux n’est exclu par la loi des charges ni des honneurs. Il est permis à tous les Perses d’envoyer leurs enfants aux écoles communes de justice. Cependant il n’y a que ceux qui peuvent élever leurs enfants à ne rien faire, qui les y envoient ; ceux qui ne peuvent pas ne les y envoient pas. Les enfants instruits dans ces écoles communes peuvent seuls passer dans la classe des jeunes gens. Ceux qui n’y ont pas été instruits en sont exclus. D’autre part, ceux qui ont fait leur temps légal parmi les adolescents, peuvent passer dans la classe des hommes faits, et prendre part aux dignités et aux honneurs ; tandis que ceux qui n’ont point passé par la classe des enfants et celle des adolescents n’entrent pas dans celle des hommes faits. Enfin ceux qui ont demeuré, sans donner lieu de plainte, le temps prescrit parmi les hommes faits, prennent place parmi les vieillards. Ainsi la classe des vieillards se compose de ceux qui ont passé par tous les degrés du bien. Telle est l’organisation du gouvernement, par laquelle les Perses croient parvenir à se rendre meilleurs.

Au reste, il dure encore aujourd’hui chez eux des marques de leur extrême frugalité et de leur attention à digérer par l’exercice. C’est une honte encore aujourd’hui chez les Perses de cracher, de se moucher, et de se montrer allant à l’écart pour quelque besoin semblable ; ce qui leur serait impossible, s’ils n’étaient fort sobres dans leur manger, et s’ils ne dissipaient par l’exercice les humeurs forcées ainsi de prendre un autre cours. Voilà ce que nous avions à dire des Perses en général : parlons maintenant de Cyrus, qui est l’objet de cet écrit, et traitons de ses actions, à partir de son enfance.

  1. Cent vingt mille, probablement sans compter les femmes, les enfants et les esclaves.