Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/225

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encore afin que, si par hasard tu te trouves sans devin, loin d’être embarrassé d’expliquer les signes divins, la divination te fasse connaître la volonté des dieux et te mette en état d’y obéir. — Mon père, dit Cyrus, pour mériter que les dieux propices veuillent me conseiller, je continuerai toujours, tant que je le pourrai, de me conformer à ton langage. Car je me rappelle t’avoir entendu dire un jour qu’un moyen efficace d’obtenir ce qu’on souhaite des dieux aussi bien que des hommes, c’est de ne point attendre qu’on soit dans la détresse pour leur rendre hommage, mais que la prospérité est le moment même où il faut se souvenir des dieux ; tu disais également que c’est ainsi qu’on doit agir avec ses amis. — N’est-ce donc pas, mon fils, en raison même de ces maximes, que tu viens avec plus de plaisir prier les dieux, et que tu espères davantage obtenir ce que tu leur demandes, attendu que ta conscience ne te reproche point de les avoir négligés ? — Cela est vrai, mon père, je considère les dieux comme des amis pour moi. — Te souvient-il aussi, mon fils, de ce que nous avons dit un jour à ce propos ? Les hommes qui savent ce que les dieux ont mis à notre portée, réussissent mieux que ceux qui les ignorent ; ceux qui travaillent vont plus vite que ceux qui demeurent oisifs ; le soin est une voie plus sûre que l’incurie, et il faut se montrer tel qu’on doit être, quand on veut demander quelques biens aux dieux. — Oui, par Jupiter, dit Cyrus, je me rappelle t’avoir entendu dire ces paroles ; et j’ai dû me rendre à l’évidence de ton langage. Je sais que tu disais encore qu’il n’est pas permis de demander aux dieux, quand on ne sait pas monter à cheval, de vaincre dans un combat à cheval ; quand on ne sait pas tirer de l’arc, de l’emporter en tirant de l’arc sur ceux qui le savent ; quand on ne sait pas gouverner, de vouloir sauver un vaisseau en le gouvernant ; quand on ne sème pas de grains, de demander de faire une bonne récolte ; quand on n’a rien fait pour se défendre à la guerre, de demander à n’être pas Vaincu. Tout cela, en effet, est contraire aux lois établies par les dieux ; et tu disais que, quand on demande des choses injustes, il est aussi naturel de ne pas les obtenir des dieux, que de ne rien obtenir des hommes quand on leur demande des choses illégales. — Mais, as-tu donc oublié, mon fils, ce que nous disions encore moi et toi ? qu’il est beau pour un homme de pouvoir veiller à devenir lui-même beau et bon à toute épreuve, et de se procurer les moyens d’avoir largement le nécessaire, lui et ses serviteurs. Mais si c’est là un grand point