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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/253

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avait rangées en face l’une de l’autre : tous avaient leur cuirasse et le bouclier au bras gauche. Il met alors de grosses cannes dans la main droite de la moitié des soldats, et dit aux autres de commencer l’attaque en frappant avec des mottes de terre. Quand les deux bandes sont ainsi organisées, il donne le signal du combat, et à l’instant les mottes de terre sont lancées et vont frapper les cuirasses et les boucliers, les cuisses et les jambes. Mais la mêlée s’engageant, les soldats armés de cannes frappent les autres aux cuisses, aux jambes, aux mains, et, quand ils se baissent vers les mottes de terre, ils leur frappent le cou et le dos. Enfin, les porte-cannes les mettent en fuite et les poursuivent en les frappant, avec force rire et gaieté. Puis la réciproque a lieu : les gens aux mottes prennent les cannes et font la même chose à ceux qui leur jettent des mottes. Ce passe-temps réjouit beaucoup Cyrus, et l’invention du taxiarque, et l’obéissance des troupes, et l’exercice mêlé de plaisir, et surtout la victoire demeurant à ceux qui étaient armés à la perse. Ravi de tout cela, il les invite à dîner ; et sous la tente voyant quelques-uns d’entre eux pansés l’un à la jambe, et l’autre au bras, il leur demande ce qui leur est arrivé. Ils répondent qu’ils ont été blessés par les mottes de terre. Il leur demande encore s’ils ont été blessés dans la mêlée ou bien à distance. Ils lui disent que c’est à distance. Alors les porte-cannes prétendent que la mêlée avait été un jeu superbe, mais ceux qui avaient reçu des coups de cannes s’écrient que les coups reçus de près n’étaient point du tout un jeu : et en même temps ils montrent les coups que les porte-cannes leur ont donnés sur les mains, sur le cou, quelques-uns même au visage. Et alors, comme de juste, on se met à rire les uns des autres. Le lendemain, toute la plaine était remplie de gens qui faisaient le même exercice : et depuis, dès qu’on n’avait rien de sérieux à faire, on jouait à ce jeu.

Une autre fois, Cyrus voit un taxiarque qui mène son bataillon le long de la rivière, en faisant filer ses soldats sur la gauche, un par un ; puis, à un moment voulu, il commande au second loche, au troisième et quatrième de s’avancer au front. Alors, quand les lochages se trouvent de front, il fait avancer leurs loches deux par deux : cela fait, les décadarques s’avancent au front ; puis, au moment voulu, il leur commande de mener leurs loches quatre par quatre : à leur tour les pempadarques s’avancent au front, et leurs loches marchent quatre par quatre ; arrivés à la porte, il commande le mouvement : « Marche un