Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/286

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tenu leurs javelots. Grâce à votre obéissance, il est revenu sain et sauf, et sains et saufs avec lui tous les siens. J’en vois d’autres qui sont blessés ; je m’informerai dans quelles circonstances ils ont reçu leurs blessures, et je m’expliquerai sur leur compte. Pour Chrysantas, bras exercé dans la guerre, tête prudente, capable d’obéir et de commander, je lui donne, dès ce moment, le grade de chiliarque ; et, si la Divinité m’accorde quelque nouvelle faveur, je ne l’oublierai pas. Je veux aussi vous rappeler une seule chose, à vous tous. Ce que vous avez vu dans ce combat, ne cessez jamais d’y penser, afin de juger par vous-mêmes lequel vaut mieux pour sauver sa vie, de la valeur ou de la fuite, si ceux qui sont de bon cœur au combat s’en tirent plus facilement que ceux qui marchent contre leur gré, et enfin quel plaisir procure la victoire : vous en jugerez sainement et d’après votre propre expérience et sur le fait qui vient de s’accomplir. En y songeant, vous en deviendrez plus braves. Maintenant, allez dîner en soldats religieux, braves et sages, faites des libations aux dieux, entonnez un péan et tenez-vous prêts à exécuter les ordres. » Cela dit, il monte à cheval et va trouver Cyaxare. Il se réjouit avec lui, comme de juste, observe ce qui se passe de ce côté, lui demande s’il lui faut quelque chose et revient au galop vers son armée. Les soldats de Cyrus, après avoir dîné, posé les sentinelles nécessaires, se livrent au repos.

Cependant les Assyriens, après la mort de leur chef et des meilleurs soldats, sont tous au désespoir : quelques-uns s’enfuient du camp pendant la nuit. Ce que voyant Crésus et les autres alliés, ils sont tous au désespoir : tout, en effet, était critique. Ce qui met le comble à leur découragement, c’est que l’état-major de leur armée semble avoir perdu le sens ; ils abandonnent le camp et se sauvent durant la nuit. Quand le jour est venu, et qu’on voit le camp déserté par les ennemis, Cyrus y fait entrer les Perses les premiers. Les ennemis y avaient laissé quantité de brebis, quantité de bœufs, quantité de chars remplis de toute espèce d’objets utiles. Alors arrivent tous les Mèdes avec Cyaxare, et l’armée entière prend là son repas en cet endroit. Cyrus, ayant ensuite convoqué les taxiarques, leur adresse ces mots :

« Que de biens, et quels biens ! nous échappent, mes amis, quand les dieux cependant nous les donnent ! En ce moment, les ennemis ont pris la fuite, vous le savez. Les gens qui ont abandonné, pour fuir, un retranchement comme celui-là, com-