Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/307

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qu’on ne fasse tort à personne ; que les marchands puissent vendre tout ce qu’ils ont de denrées, puis, celles-là vendues, en amener d’autres, afin que votre camp soit fréquenté. »

On fait aussitôt la proclamation. Alors les Mèdes et les Hyrcaniens : « Mais comment, disent-ils, opérer ce partage sans vous et les vôtres ? » Cyrus à cette observation répond ainsi : « Et croyez-vous, guerriers, que rien ne doive se faire ici sans que nous y assistions tous ? Ne suffit-il pas, quand il le faut, que j’agisse pour vous et que vous agissiez pour moi ? En procédant autrement, n’est-ce pas multiplier les affaires et diminuer les chances de succès ? Mais voyez vous-mêmes : nous vous avons gardé le butin, et vous avez la certitude que nous l’avons bien gardé ; à votre tour, distribuez-le, et nous, nous aurons la certitude que vous l’avez bien distribué. De notre côté, nous essayerons d’agir aussi dans l’intérêt commun. Ainsi, voyez d’abord le nombre de chevaux que nous avons, ou qu’on nous amène. Si nous les laissons sans les monter, ils ne nous serviront à rien, et nous embarrasseront à soigner ; mais, si nous les donnons à des cavaliers, nous serons délivrés de ce soin et nous augmenterons notre force. Si vous avez à qui les donner, et avec qui vous préfériez courir les hasards de la guerre plutôt qu’avec nous, donnez-les-leur ; mais si vous préfériez nous avoir pour compagnons, donnez-les-nous. Lorsqu’en poursuivant les ennemis sans nous vous couriez des dangers, nous craignions beaucoup qu’il ne vous arrivât malheur, et vous nous faisiez rougir de ne pas être où vous étiez ; mais quand nous aurons des chevaux, nous vous suivrons. Si nous vous semblons plus utiles en combattant à cheval, notre ardeur ne sera point en défaut ; si vous nous croyez plus propres à vous seconder en restant à pied, nous mettons pied à terre, et, redevenus aussitôt fantassins, nous sommes à vous. Nous aurons sous la main des gens à qui donner nos chevaux. » Ainsi parle Cyrus. Ceux-ci lui répondent : « Mais nous n’avons personne, Cyrus, à faire monter sur ces chevaux, et, nous aurions quelqu’un, du moment que tu le désires, nous ne choisirions point ailleurs. Et maintenant, ajoutent-ils, prends-les et fais-en ce que bon te semblera. — Je les accepte, dit Cyrus, et bonne chance à nous, pour devenir cavaliers, et à vous, pour partager le butin commun ! Commencez par mettre de côté pour les dieux ce que les mages vous indiqueront ; puis choisissez pour Cyaxare ce que vous croirez devoir lui être le plus agréable. » Ils disent, en riant, qu’il faut lui choi-