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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/428

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l’envoyé remédie au mal ; s’il ne le peut, il en fait part au roi. D’après ce rapport, le roi décide de ce qu’il doit faire du délinquant. C’est d’ordinaire parmi ceux dont on dit : « Voilà le fils du roi qui descend ! C’est le frère du roi ! C’est l’œil du roi ! » que sont choisis ces inspecteurs ; quelquefois même ils n’arrivent point à destination, chacun d’eux retournant sur ses pas, s’il plaît au roi de les rappeler.

Voici encore une invention de Cyrus, fort utile pour l’immensité de son empire, et au moyen de laquelle il était promptement informé de tout ce qui se passait dans les contrées les plus éloignées. S’étant rendu compte de ce qu’un cheval peut faire par jour sans être excédé, il fit construire sur les routes des écuries distantes l’une de l’autre de ce même intervalle, et y fit mettre des chevaux et des gens chargés de les soigner : il devait y avoir dans chacune d’elles un homme intelligent pour recevoir les lettres apportées par un courrier, les remettre à un autre courrier, prendre soin des hommes et des chevaux qui arrivaient fatigués et en fournir de frais[1]. Quelquefois même la nuit ne retarde point la marche des courriers ; celui qui a couru le jour est remplacé par un autre qui se trouve prêt à courir la nuit : aussi a-t-on dit d’eux que les grues ne feraient pas aussi vite le même chemin. Si ce mot est exagéré, il est du moins certain qu’on ne peut voyager sur terre avec plus de vitesse. Or, c’est une chose excellente que, quand un fait est digne d’intérêt, on puisse y veiller sur-le-champ.

L’année révolue, Cyrus rassemble son armée à Babylone. On prétend qu’elle était composée de douze myriades de cavaliers, de deux mille chars armés de faux, et de soixante myriades de fantassins. Ces préparatifs rassemblés, il entreprend la fameuse expédition, dans laquelle il subjugue toutes les nations qui habitent les frontières de la Syrie jusqu’à la mer Érythrée : de là, son armée se dirigeant, dit-on, vers l’Égypte, l’Égypte est également conquise. De sorte que son empire a de ce moment pour bornes, à l’orient, la mer Érythrée ; du côté de l’Ourse, le Pont-Euxin ; au couchant, l’île de Cypre et l’Égypte ; au midi, l’Éthiopie ; région dont les extrémités sont presque inhabitables, par la chaleur ou par le froid, par les inondations ou par la sécheresse. Cyrus fixe son séjour au centre de ces différents pays, passant les sept mois d’hiver à Babylone, dont le climat

  1. Il est curieux de voir ici l’origine de l’institution de la poste, l’un des plus admirables ressorts administratifs de notre temps.