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VOYAGES DES PÈLERINS BOUDDHISTES.

viennent s’y jeter et s’y confondre. La couleur de l’eau est d’un noir verdâtre, et sa saveur est à la fois salée et amère. Tantôt ses vastes flots s’étendent en nappes immenses, tantôt ils s’enflent et roulent avec impétuosité. Les dragons et les poissons y habitent ensemble, et, de temps en temps, on en voit surgir des monstres extraordinaires. C’est pourquoi les voyageurs qui vont et viennent, adressent des prières (au Ciel) pour obtenir le bonheur. Quoique les hôtes du lac soient fort nombreux, personne n’ose les pêcher.

Après avoir fait environ cinq cents li au nord-ouest du lac Thsing-tchi, il arriva à la ville de la rivière Sou-ye[1]. Cette ville a de six à sept li de tour ; c’est le rendez-vous des marchands des divers royaumes.

Le sol est favorable au millet rouge, au froment et aux raisins ; les arbres des forêts y sont clair-semés. Comme le climat est froid et qu’il y règne un vent glacial, les habitants portent des vêtements de laine feutrée.

À l’ouest de Sou-ye, on voit quelques dizaines de villes isolées. Dans chaque ville, on a établi des chefs, qui sont indépendants les uns des autres ; mais ils sont tous soumis aux Tou-kioue (Turcs). Depuis la ville de la rivière Sou-ye, jusqu’au royaume de Kie-choang-na (Kaçanna), le pays s’appelle Sou-li, et les habitants portent le même nom. Cette dénomination s’applique aussi à l’écriture et au langage. Les

  1. Suivant Klaproth, cette rivière est la même que celle que les Chinois appellement Na-mi.