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MÉMOIRES DE HIOUEN-THSANG, L. I.

« Le frère cadet : « Je n'oserais fuir le châtiment ; mais je prie le roi d'ouvrir la boîte d'or. » Le roi l'ouvrit aussitôt et reconnut qu'elle contenait deux testicules que le fer avait retranchés. Le roi s'écria : « Quels sont ces objets extraordinaires ? Que voulez-vous me réveler par là ? » Il répondit : « Autrefois, lorsque le roi voulut voyager par le monde, il m’ordonna de rester pour gouverner à sa place le royaume. Craignant d’être en butte à la calomnie, je me suis coupé ces organes virils, pour me justifier d’avance. Maintenant, vous avez la preuve de mon innocence. Je désire que le roi daigne abaisser sur moi ses yeux éclairés. » Le roi fut pénétré pour lui de respect et d'admiration, et lui voua une affection qui ne fit que s’accroître de jour en jour. Il lui permit de fréquenter librement le palais intérieur[1]. « Dans la suite, le frère cadet du roi rencontra sur sa route un homme qui conduisait cinq cents taureaux et qui voulait leur faire subir la castration. Le prince réfléchit en lui-même ; il compara son état au sort qui les menaçait, et s’intéressa vivement à eux. « Maintenant, dit-il, mon corps se trouve mutilé ; n’est-ce point à cause des péchés de ma vie antérieure ? » Aussitôt, il employa ses richesses et ses bijoux pour racheter cette troupe de taureaux. Par la vertu de sa tendre pitié, peu à peu ses organes virils revinrent com-

  1. Il y a, en chinois, Heou-t-ing « la salle de derrière », expression qui a le même sens que Tchong-kong, p.8, note 1. Heou-t'ing s'emploie encore pour désigner les favorites du roi. (Peï-wen-yun-fou, liv. XXIV A, f. 100.)