Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/172

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régulier et nouvellement construit : c’est une spéculation privée du duc de Choiseul, dont la famille y a une loge à perpétuité. On jouait l’Amant jaloux. Il y a une jeune cantatrice, mademoiselle Renard, dont la voix est si suave, que, chantant en italien et selon la méthode italienne, elle ferait une charmante artiste.

Visite la tombe du cardinal de Richelieu ; noble production du génie, la plus belle statue de beaucoup que j’aie vue. On ne peut souhaiter rien qui soit plus aisé et plus gracieux que l’attitude du cardinal, ni une plus grande expression que celle de la science en larmes. Dîné au Palais-Royal avec mon ami. Le monde y est bien mis, les repas propres, bien préparés et bien servis : mais ici, comme partout ailleurs, il faut payer bon pour de bonnes choses ; ne l’oublions pas, payer peu une chose mauvaise n’est point un bon marché. Le soir, à la Comédie française, l’École des Pères, pièce lamentable, genre larmoyant. Ce théâtre, le principal de Paris, est un bel édifice avec un portique superbe. Après les salles circulaires de France, comment supporter nos trous oblongs et mal agencés de Londres ?

Le 16. — Rendez-vous chez M. Lavoisier. Madame Lavoisier, personne pleine d’animation, de sens et de savoir, nous avait préparé, un déjeuner anglais au thé et au café ; mais la meilleure partie de son repas, c’était, sans contredit, sa conversation, soit sur l’Essai de M. Kirwan sur le Phlogistique, qu’elle est en train de traduire, soit sur d’autres sujets qu’une femme de sens, travaillant avec son mari dans le laboratoire, sait si bien rendre intéressants. J’eus le plaisir de visiter cette retraite, théâtre d’expériences suivies par le monde scientifique. Dans l’appareil pour les recherches sur l’air, rien ne frappe autant que la partie destinée