Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/181

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que l’on nous donne des jardins chinois, d’où l’on suppose que vient notre style. Il a plus de la manière de sir W. Chambers que de M. Brown ;[1] plus d’art que de nature ; cela sent plus le faste que le bon goût. On concevrait difficilement une chose que l’art peut placer dans un jardin, qui ne soit pas dans celui-ci. On y voit des bois, des rochers, des pelouses, des lacs, des rivières, des îles, des cascades, des grottes, des promenades, des temples, de tout, jusqu’à un village. Plusieurs parties sont très jolies et bien exécutées. La seule chose à reprendre est l’entassement, erreur qui a conduit à une autre, celle de sillonner la pelouse par trop de sentiers sablés, erreur commune à presque tous les jardins que j’ai vus en France. Mais la gloire du petit Trianon, ce sont les arbres et arbrisseaux exotiques. Le monde entier a été heureusement mis à contribution pour l’orner. On en trouve qui sont à la fois et beaux et curieux pour charmer les yeux de l’ignorance et exercer la mémoire des savants. Parmi les édifices, je citerai le Temple de l’Amour comme vraiment élégant.

Versailles, encore une fois. En parcourant l’appartement que le roi venait de quitter depuis un quart d’heure à peine, et qui portait les traces du léger désordre causé par son séjour, je m’amusais de voir les figures de vauriens circulant sans contrôle dans le palais, jusque dans la chambre à coucher ; d’hommes dont les haillons accusaient le dernier degré de misère ; et cependant j’étais seul à m’ébahir et à me demander comment diable ils s’étaient introduits. Il est impossible

  1. Brown est connu par toute l’Angleterre par son talent à dessiner des jardins anglais. On l’appelle d’ordinaire Brown la Capacité, parce qu’il se sert toujours de ce mot à la vue d’un terrain où il lui parait possible de faire quelque chose — Zimmermann.