Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/327

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Est-ce qu’il n’était pas loisible à tous de voir qu’elle défaillait, qu’elle pouvait à peine se raidir au moment d’accomplir l’horrible démarche !…

Avant qu’on l’eût annoncée, le vieil ami avait entendu sa voix ; il accourait sous le porche. Elle le vit arriver, les mains aux poches de son petit veston court, si vif, si anxieux !

— Vous n’êtes pas malade ?

— Non, docteur, dit-elle, en s’efforçant de rire, à cause du domestique qui les regardait tous deux. J’ai seulement un petit renseignement à prendre chez vous, si vous voulez bien…

Il la mena, à travers ses beaux appartements confortables, où, dans la pénombre, saillaient les luisants du luxe : la salle à manger, avec l’or de ses broderies chinoises, le salon turc aux cuirs odorants, le salon d’attente, le billard, et enfin le cabinet où il la fit s’asseoir.

Elle était sans force, sans voix, sans souffle. Il perdit, à la voir ainsi, la joie qu’il avait eue à son arrivée, la joie de la posséder chez lui, de la trouver dans ce coin d’intimité, de lui montrer sa maison, le cadre de sa vie, un peu du mystère de sa solitude, la joie de voir réaliser le rêve si souvent fait, le rêve si cher aux hommes qui aiment. Debout devant elle, il se pencha, lui prit les mains.