Page:Yver - Haudequin de Lyon.djvu/25

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On entendait couramment des hommes sérieux déclarer : « J’ai vu le bottier d’Adolphe Haudequin », ou : « Je connais son chemisier, une toute petite boutique. »

Depuis cinq ans, il avait marié sa fille aînée au marquis de Saint-Sever ; la seconde, au fils d’un sénateur de l’Ain. La troisième était madame de Guillancourt. D’ailleurs sa femme était née de Monthaloup.

Philippe appartenait trop à Lyon pour ne pas mesurer le personnage paternel à son chiffre d’affaires qui était monté l’an dernier à cinquante-quatre millions. Cela composait un prisme de première puissance pour un fils qui juge son père ; d’autant qu’il s’agissait de millions sains et honnêtes, comme des millions de la campagne nés du trafic des bœufs ou du blé. Ni fraude ni duperie dans ce commerce-là, comme s’il fallait à la soie, de même qu’une température égale, un air pur. Il suffisait d’une fécondité inlassable dans la production. Le secret est là.

Philippe revenait, pour se noyer dans la grande ombre paternelle, sans cette voracité qu’on aurait observée ailleurs pour la colossale fortune à laquelle il participerait un jour. Les cinquante-quatre millions de chiffre d’affaires étaient plutôt comme une victoire à poursuivre, un grand et agréable devoir, mais difficile. C’est déjà beaucoup d’avoir un nom à soutenir, mais ce jaillisse-