Page:Yver - L Enfant de la balle.djvu/61

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de la faire causer ; chose difficile, étant donnée la timidité de l’enfant. Et, aussitôt que la conversation tombait, la petite se disait encore :

— Ce souvenir de Roland, je ne le retrouverai pas ! S’il le savait !

Sa gorge se serrait, et des larmes lui montaient aux yeux.

M. Patrice s’en aperçut bien ; et le soir, en rentrant, il demanda à sa fille :

— Qu’avais-tu donc ce matin, ma chère Jen ? tu as été taciturne et toute triste au déjeuner.

L’enfant réfléchit un instant avant de répondre ; puis une foule de souvenirs lui revinrent en tête, et surtout la recommandation que Rosalie lui avait faite, la veille, de ne pas écrire au père Mousse ; la scène du départ ; Roland, cette poésie égarée, et, ce qui ressortait de tout cela, c’était comme l’idée d’un immense gouffre creusé entre ses pauvres amis et elle. Alors, elle n’y tint plus, et, se jetant dans les bras du vieux monsieur, elle se laissa aller à tout son chagrin.

— Qu’as-tu, ma pauvre Jen, qu’as-tu ? répétait celui-ci tout attristé.

Nécessairement, la fillette ne répondit pas. Il se rappela alors le petit bout de papier trouvé le matin, et, comme à ce moment il voulait distraire l’enfant, il retira de sa poche les vers du petit poète.

— Tiens, mignonne, tu as laissé tomber cela ici.