Page:Yver - La Bergerie.djvu/254

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antique de possession sans propriété qui est le colonat. C’était une théorie énorme et puissante, voisine du socialisme, qui, exprimée dans la presse, aurait révolutionné l’opinion. Il l’élaborait secrètement, patiemment, tout en mesurant lui-même, dans des boisseaux, le blé noir et le blé blanc qu’on doit mélanger en proportions savantes pour la basse-cour, ou en éprouvant au toucher la litière des étables.

Un jour, il confia discrètement à Frédéric la tristesse que lui causait cette mort lente de la Terre à la Bergerie. Le jeune homme pouvait désormais le comprendre. Il lui montra des étendues de sol abandonnées sur la ferme des Trois-Mares. Le tenancier à qui on l’avait affermée, sous réserve de partager avec lui le fruit des récoltes, voyant ses besoins plus que satisfaits, ses fils partis à la ville, laissait se rétrécir peu à peu le rayon de l’exploitation. De-ci, de-là, chaque année, un champ s’endormait inactif, improductif disait-on. M. de Marcy s’indignait, sachant bien que la terre est immortelle et que de ces friches on pourrait faire jaillir des monceaux de blé. Il connaissait aussi des terres maraîchères, riches et limoneuses, converties en cours où se roulaient des poulains trop gras, quand cette opulence de l’agriculture, les légumes, s’y seraient nourris à pleines racines. Il excitait alors en Frédéric