Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/125

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XI

On aurait pu présager que les rapports changeraient dès lors entre le Donneur et le Récepteur qui avaient interverti leurs rôles naturels. Mais il arriva que le père, comblé par l’enfant généreux, connut à cette période une allégresse triomphante. Il venait de gagner une guerre. Sa victoire était merveilleuse. Au réveil, le matin, quand il prenait conscience de soi-même, son premier enregistrement de la réalité c’était : « Pierre ne se fera pas moine. » Et il devait demeurer tout le jour dans une sorte d’euphorie née de cette écharde arrachée à son cœur véhément. Le retour à Paris, dans le train, fut délicieux pour ce père prodigue. Son fils — au fond désemparé, obligé à se recréer un nouvel horizon qu’il n’aimait pas d’avance, travaillé de scrupules et comme honteux devant son Dieu de s’être repris à lui, bien que par force — ne pouvait se défendre de goûter à cette joie paternelle, si évidente, dont il était la source. Jamais, depuis la rupture d’Arbrissel et de la princesse volage, il n’avait vu son grand homme frémir ainsi à nouveau de la joie de vivre.