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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/167

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Mais, dans l’embrasure d’une fenêtre, la petite Altesse avait entraîné le prince Géo. Ils parlaient peu ; leurs regards se miraient l’un l’autre. L’archiduchesse avait les lèvres mi-ouvertes, des lèvres d’une délicatesse excessive, dont le sourire montrait la pointe des dents, et le bel officier de marine, au sombre habit relevé d’or, contemplait · suavement ces tendres lèvres, il les baisait en pensée, les admirait, les adorait. Wanda lui dit :

— Le temps m’a duré, Géo, jusqu’à aujourd’hui…

Et lui, avec la puérile sollicitude des amants très jeunes :

— Avez-vous eu très mal au genou ?

Et elle expliquait qu’en souffrant, elle pensait à lui, ce qui rendait sa douleur délicieuse. Ils avaient les propos purs et touchants de deux enfants qui s’aiment et s’émerveillent à se mieux connaître. Leur amour comportait une grande mélancolie. Ils en parlaient comme d’un mal qui les eût minés.

— Moi, les nuits, je reste éveillée longtemps.

— Ah ! moi je me décourage. Toute action me pèse, tout visage entrevu m’importune. Il n’y a qu’un visage au monde, pour moi.

Ils s’exhortaient :

— Prenons patience. Voyez Lina.

— Oh ! Lina, elle est heureuse, elle !

Et la petite Altesse s’enfonçait davantage dans l’embrasure de la croisée. Le bleu de ses yeux