Page:Yver - Les Cervelines.djvu/177

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contre vos jeunes camarades, Tisserel, je sais d’ailleurs que vous vous tenez en dehors de ces cabales. Mais vous êtes un jeune médecin sérieux, qui possédez mon estime, et vous auriez pu être influencé par le bruit mené autour de cette affaire, ce qui me fâcherait.

Tisserel se hasarda à dire :

— Le docteur Cécile est mon ami. Je désirais son succès.

Le vieil homme haussa les épaules.

— Il vous aura, comme les autres, parlé de passe-droit, c’est clair ! De passe-droit, il n’y en a pas eu. Gérey n’est pas un garçon brillant, il ne paie pas de mine, son extérieur me séduit pas, mais il a la lenteur sagace du véritable opérateur. Il était hier fort intimidé ; aussi n’avons-nous pas dû tenir compte de certaines hésitations qui lui donnaient apparemment le dessous contre Cécile. Selon moi, un examen doit porter moins sur le point précis d’une question posée, que sur la base de savoir qui est dans le candidat. Nous avons compris que Cécile, joli parleur, rhétoricien, avec son aspect de médecin coquet, n’aurait pas la prudence sensée de l’autre, qui possède moins d’esprit, à ce qu’il semble, mais qui sait.

Tisserel devenait nerveux et tremblait à d’appui du fauteuil où posaient ses mains. Il ne demandait qu’à se laisser envelopper par : l’argumentation facile du père Le Hêtrais, et qu’à s’accréditer dans ses bonnes grâces ; mais sa conscience ne se réduisait pas si facilement. Il sentait lui échapper cette belle occasion de défendre son ami ; il se sentait commettre une vilaine petite trahison.