Page:Yver - Les Cervelines.djvu/62

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perse à ramages dans le fond, était si réel devant ses yeux, qu’il eût pris la statuette, lui semblait-il, en étendant la main.

— Il y a un monde fou, dit une dame qui le réveilla de sa torpeur ; on se bat moins pour entendre la conférence que pour voir Marceline Rhonans.

C’est de l’obsession, pensa-t-il ; qu’est-ce donc encore que celle-là dont tout le monde parle ?

La dame poursuivit :

— Elle est de plus en plus à la mode ; ici, on est tout à fait engoué d’elle.

— Il est certain, reprenait une interlocutrice, que c’est une personne bien spéciale, un phénomène. Songez donc, cette créature-là sait tout !

— Quel âge a-t-elle ?

Le tramway s’arrêtait ; le docteur Jean Cécile était arrivé devant l’Hôtel-Dieu et dut descendre ; mais une pointe de curiosité lui fit imperceptiblement regretter la réponse qu’il n’avait pas entendue.

Quand il eut franchi la grille et pénétré dans la cour longue, à double allée de sycomores, qu’enclavaient les lourdes bâtisses de l’hôpital et leurs rangées de fenêtres régulières, il fut repris par les influences agréables de son métier. Il aimait les hôpitaux, instinctivement, comme les pieux fidèles aiment l’église, comme les habitués, le théâtre, comme un artiste, les musées. Ses narines s’ouvraient familièrement aux relents échappés des salles : cette odeur douce, presque sucrée de l’iodoforme, qui reste aux gens du monde, évocatrice de chairs malsaines, de purulences, d’atrocités morbides, mais où il retrouvait, lui, son at-