Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/210

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sous lesquelles craquait le pain croustillant, et un air de parfait détachement qui suffit à confirmer la supposition. Mademoiselle Angély continua :

— N’est-ce pas un péché qu’une jeune femme investie de la plus noble fonction qui soit, le droit de défense, la dédaigne et s’y dérobe ? Il y a par le monde des milliers de femmes intelligentes et oisives que tue le désœuvrement, le sens de leur inutilité, et qui pourraient envier cette pauvre robe d’étamine noire, grâce à laquelle vous faites tant de bien. Car faire le bien, il n’y a que cela de bon, n’est-ce pas ? Si vous vous êtes livrées toutes à de très dures études, si vous avez conquis tant de parchemins, si vous avez revendiqué le privilège de remplir la plus haute mission sociale aussi bien que les hommes, ce n’était assurément pas pour leur faire la nique, une fois installées dans les prétoires, au même banc qu’eux. Égaler les hommes, faire assaut avec eux de cérébralité, de force, de puissance, comme c’est puéril ! comme c’est sot ! Nous ne les surpasserons jamais : nous sommes des créatures très différentes ; des auxiliaires inventées, en somme, pour être, avant tout, les protectrices de l’enfant, de ce petit être que l’homme procrée et dont, après, il se désintéresse un peu… Ce qui est vrai dans la famille l’est dans la société… Aucune femme ne peut être indifférente à l’enfance, chacune doit se sentir la tutrice du premier enfant