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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/216

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laissé le coupable profiter d’une situation offerte, dans ce délai, à l’étranger, où il se fût réhabilité.

Au nom de Maurice. Louise Pernette, qui se contentait jusqu’alors d’écouter en cachant de son mieux sa mélancolie, se rapprocha. Toutes trois s’accordèrent alors pour louer certains procureurs de la République qui bouleversaient tout le vieil appareil de la Justice en se faisant les meilleurs collaborateurs de la défense. Un vent de mansuétude et d’humanitarisme soufflant à ce moment-là dans les hautes sphères politiques, on devinait, dans leurs réquisitoires au rebours, comme l’influence d’un mot d’ordre, une intention de sérénité philosophique et presque un empiétement sur le rôle de l’avocat. C’était bien là, selon les trois jeunes filles, l’idéal judiciaire de l’avenir : le règne de la Bonté le crime doucement admonesté plutôt que puni… Et, comme leurs propos s’échauffaient, les six autres dames, attirées par le sujet même de la conversation, rejoignirent, une à une, curieusement, le petit groupe qui pérorait derrière la table à thé. Madame Surgères, ayant entendu les derniers mots, s’écria :

— Tiens ! nous ne sommes plus des barbares. La persistance du droit de châtier est un déshonneur pour notre société. Ah ! je rêve d’un Palais de Justice nouveau, où les juges seraient des pontifes pitoyables se penchant vers les criminels avec la douceur que donne la vertu.