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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/409

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— Vous qui êtes entrée dans leur intimité, lui disait-elle, vous devez bien savoir la cause de leur désaccord.

— Je vous jure que j’ignore tout.

— Il n’y a pas de mal à en parler, puisque la rupture est publique. Ne s’aimaient-ils plus ? C’est une chose qu’eux-mêmes ignorent peut-être, répondait la spirituelle femme, énigmatique.

Louise, depuis quelques mois, devenait tout autre, prenait de l’aplomb, avait un air nouveau pour promener par les couloirs sa serviette légèrement gonflée. Maurice Servais, demeuré secrétaire de Fabrezan, et qui avait aujourd’hui passablement à faire, n’était pas néanmoins si occupé qu’il n’eût, parfois, le loisir de s’arrêter dans la gothique et mystérieuse galerie Saint-Louis : on l’y revoyait avec son amie. C’est à cette époque, d’ailleurs, qu’il fit acquitter aux assises, où sa fougue le servit plutôt qu’elle n’amoindrit son talent, l’infirmière empoisonneuse, Marie Jemps. Dès lors il put être, à son aise, nerveux et trépidant : il était sacré l’émule de Ternisien, et il commença de connaître cet honneur particulièrement grisant qui réside, pour un avocat, dans la faveur des grands criminels. Il éleva ses prix, se mit sur le pied de gagner dix mille francs par an, et, du fait qu’il pouvait dorénavant épouser Louise quand elle le voudrait bien, s’aperçut qu’il l’aimait furieusement.