leur baiser du matin et du soir ? Elle eût été incapable de le dire. Mais avec sa loyauté foncière, elle allait chercher ses torts dans le passé, et, chemin faisant, trouvait des excuses à la défaillance de son mari. EL dans un tel désarroi, Louise venait lui demander ses lumières ! C’était l’obligation de couper court à ses tergiversations, d’aboutir net à la conclusion de ses raisonnements branlants. Elle hésita longtemps, puis, tout à coup :
— Ma petite Pernette, écoutez-moi. Aimez-vous Servais ?
Les beaux grands yeux de Louise s’enflammèrent ; une expression passionnée transfigura cette calme stagiaire qui rougissait encore si une jeune cuisinière lui avouait crûment : « Voilà, madame ; je me suis laissé faire un gosse… » Entre les deux amies, la vision de l’ardent Maurice passa, Louise dit seulement :
— Oui, je l’aime.
— L’adorez-vous, Louise ?
— Assez pour avoir oublié le chagrin qu’il m’a fait subir. Assez pour n’avoir pas voulu le peiner naguère en lui montrant que je savais tout
— Et le chérissez-vous assez pour faire davantage encore, assez pour qu’il soit tout votre bonheur, assez pour que votre plus haute fierté soit sa gloire, et votre unique gloire son amour ? Votre amour est-il assez fervent pour que tout votre orgueil soit satisfait si votre ami vous aime ? Votre ambition réclame-t-elle plus que sa ten-