Aller au contenu

Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/189

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

la séparation qu’un tel changement comporterait dans leurs deux existences. Elle voulut préciser ; lui expliqua, en y mettant beaucoup de délicatesse, qu’il n’était pas d’usage dans l’administration de maintenir deux époux à la même Direction lorsque l’un des deux changeait de grade.

— Alors tu comprends, mon pauvre chéri, que je ne puisse me réjouir à plein d’un avancement qui va nous séparer ainsi.

Denis la surprit bien en déclarant, très affectueusement du reste :

— Mais, chère amie, songe combien ce sera près de chez toi. Dix minutes de marche et tu seras à ton bureau ! Quelle différence avec le présent état de choses ! Il te sera facile de venir déjeuner à la maison, de retrouver Pierre à midi. Et puis le Contentieux ! Être nommée à ton âge sous-Chef au Contentieux, c’est énorme ! Je sais que tu es licenciée en Droit. Mais ta jeunesse ! Ta féminité ! Ah ! tu peux te flatter d’une réussite, Madame Sous-Chef !

Pas un mot sur leur séparation. Pas un regret pour les courses qu’ils faisaient ensemble matin et soir en devisant sur les potins du Ministère dont leurs deux cerveaux étaient pareillement farcis. Pas un reproche pour avoir accepté le virtuel divorce professionnel. Pas une prière pour qu’elle le refusât pendant qu’il en était temps encore. C’était là justement ce que la jeune femme attendait qu’il exigeât son refus devant un avancement mis à un tel prix. Mais non ; rien que de l’indifférence. À croire qu’il n’avait pas compris…

Elle en eut un petit frisson.

— Alors, chéri, demanda-t-elle, le cœur serré, tu n’es pas fâché que j’aie accepté !

— Mais, Geneviève, refuser, tu ne le pouvais pas !

Au long du déjeuner habituel chez sa belle-