Ce fut là, dans le silence nocturne de leur chambre où ne pénétraient plus les bruits du jour, où le souffle de leur petit enfant endormi ne s’entendait même pas, qu’elle exigea l’explication.
— On dirait que tu m’en veux de ce qui m’arrive, Denis.
Il se mit à rire de bon cœur.
— Mais je suis ravi au contraire, ma chère femme. As-tu pu me croire jaloux de ton sensationnel avancement ? Grands dieux ! comme je suis loin d’un tel sentiment ! Mon métier, tu sais bien que je l’exerce sans la moindre passion, sans ambition, sans convoitises. Je ne demande qu’à y vivre en paix en gagnant mon pain. Être sous tes ordres, même, chérie, j’avoue que j’aurais trouvé ça très « rigolo ». Je suis navré qu’on nous sépare, crainte de blesser mon orgueil. C’était une précaution bien inutile ! Mais je me réjouis pour ta santé, pour ton état présent d’un poste situé à proximité de la maison.
Cette explication parut à Geneviève sincère et raisonnable. Mais elle ne reconnaissait plus le Denis qu’elle aimait, et elle en éprouvait de la gêne.
Denis se crut redevenu célibataire. Il partait le matin, allégrement, pour le Ministère, faisait, pour le plaisir, une partie du trajet à pied, sautait dans un autobus de rencontre, arrivait encore en devançant l’heure au bureau, traitait ses dossiers plus légèrement que jamais, sachant que désormais il ne monterait plus et finirait comme rédacteur ainsi qu’il avait commencé ; sortait avec Charleman, montrait avec lui de l’enjouement, une sorte d’espièglerie. Parfois, Charleman demandait :