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Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/261

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derrière les paravents, derrière les portes, des jeux de ballon dans la chambre, des chansons…

— Maman est gentille à présent, proclamait Pierre qui parlait comme un homme aujourd’hui. Elle ne quitte plus ses petits enfants.

— Oui, mais maman n’en finit pas de poser ses rideaux, mon chéri. Et les courses ? Et le déjeuner de papa ?

Quand tout fut à peu près bâti, Mme Rousselière vint déjeuner un dimanche, invitée à planter la crémaillère. Elle arrivait assez perturbée, avec l’idée de toucher du doigt sans doute, dans ce nouveau lieu de vie pour ses enfants, une dénivellation sociale, de trouver une Geneviève harassée de travail matériel, négligée peut-être, dépassée en quelque sorte par une nouvelle condition trop dure.

L’aspect ravissant du petit appartement, surtout cette idée géniale d’avoir édifié un minuscule réfectoire dans la cuisine (cuisine toute revêtue de porcelaine d’ailleurs), grâce à ces paravents clairs, frêles murailles de papier, qui captaient et enclosaient la lumière de la fenêtre, lui arracha une exclamation : « Mais vous êtes étonnante, Geneviève. Mais vous êtes une fée ! On sent un je ne sais quoi de confortable, d’aisé, de sûr dans votre maison. Et toujours si calme vous-même, vous donnez l’impression d’une femme qui n’a rien fait de sa matinée. Vraiment, ces intellectuelles sont extraordinaires ! »

— Ma mère, répondait la jeune femme, je suis si riche de temps aujourd’hui ! Songez que toutes les heures du jour sont à ma disposition. Le temps est à moi, j’en use comme d’un trésor sans cesse renouvelé, inépuisable.

Denis regardait sa femme comme dans une extase. Il ne savait pas, non, il ne savait pas jusqu’ici le trésor qu’il possédait dans le champ de