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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/263

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princesses de science

loin de moi. Je ne me plaignais pas et je tâchais de supporter tout seul cet accablement qu’il est si doux aux hommes de partager avec leur femme. Mais hier soir, Thérèse, j’ai senti tout s’écrouler autour de moi. Mes travaux de toute une année ont été vains, mes ambitions s’anéantissent comme crèvent des bulles d’air, ma prétendue découverte tombe dans le ridicule ; je suis un homme fini. Rien ne me reste que toi. Alors j’arrive ici comme on gagne un refuge ; instinctivement je tends les bras vers toi, qui m’apparais la seule raison de vivre ; je viens mendier tes caresses, tes baisers, et je ne te trouve pas ! Et ma nuit se passe à t’attendre. Ah ! comment n’as-tu pas entendu, où que tu fusses, si lointaine et si étrangère même, comment n’as-tu pas entendu l’appel de tout mon être à ton amour ! Vois-tu, trop souvent tu m’as manqué aux heures où je défaillais d’un besoin de tendresse ; trop souvent j’ai compris que tu n’existais pas pour moi, mais seulement pour ta médecine. Jamais tu n’as eu à mon égard ces petits soins qui font que, dans sa femme, un homme trouve un peu de sa mère ; ma maison fut une sorte de restaurant, et je n’ai pas senti, comme ton père, par exemple, l’amour de ma compagne jusque dans les plats qu’on me servait… Une compagne ? Mais as-tu donc été la mienne ? Qu’avons-nous de commun ? Les repas ? N’est-ce pas un hasard quand nos deux clientèles nous permettent de les prendre ensemble ? Nos soirées ? Le plus souvent tu t’enfermes chez toi