Page:Yver - Un coin du voile.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

malheur. L’aisance serait revenue, prix de son trépas. Quatre-vingt mille francs ! Je voyais les chétives petites filles pousser sans privations, et Marie-Thérèse embellir, renaître, recouvrer la paix et cette sorte de décence qu’une femme n’a plus dès qu’elle est forcée d’avouer son dénuement. L’instant d’après je me disais que la vie puissante et jeune de ce malheureux était réduite à un souffle, et que ce souffle était à la merci de celle qui le haïssait.

» Le lendemain, à l’aube, j’étais chez eux. Marie-Thérèse vint ouvrir, pâle et plus défaite que jamais. Je lui dis :

» — Vous ne vous êtes pas couchée cette nuit ?

» Elle me répondit :

» — Non.

» J’imaginai que ce pouvait être pour mieux épier la venue de la mort. Je ne sais pourquoi il me venait contre elle d’inexplicables sévérités.

» J’avais envie de la mener durement. Elle me précéda silencieusement vers le lit. J’ouvris la boîte d’antipyrine, elle était intacte. C’était la seule médication sur laquelle je pouvais comp-