Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/121

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Quelques jours se sont écoulés. Nous arrivons à cette date du 22 août que Violetta, la pauvre démente de la mystérieuse maison de Meudon avait indiquée à Capestang : simple imagination de folie, peut-être ! Ou peut-être date se raccrochant à quelque pensée confuse luisant vaguement dans les ténèbres de cet esprit.

Ce jour-là, vers les six heures du soir, Concini était dans sa chambre, aux mains de son valet Fiorello. Sombre, les sourcils froncés, les lèvres serrées, il songeait tandis que Fiorello, le peignait, frisait sa barbe et sa moustache, lui mettait du rouge et du blanc, et tous les fards habituels, le parfumait, l’habillait enfin d’un costume en satin cerise avec flots de rubans pourpres et aiguillettes d’or, feutre de forme haute encerclé d’une grande plume ébouriffée en touffe par-devant ; enfin long manteau de satin cramoisi à collet couvrant les épaules.

Concini s’était placé devant une immense glace. Il s’examina quelque temps en silence, puis se tournant vers un homme qui, à cheval sur une chaise, les jambes allongées avait assisté à cette scène :

"Qu’en dis-tu, Rinaldo ? Parle sans contrainte..."

Rinaldo, pour toute réponse, fit entendre ce sifflement qui exprime l’admiration portée à son plus haut degré.

"Oui, reprit Concini. Plus d’un grand seigneur me jalouse. Les femmes me trouvent beau. Je le suis en effet, et j’ai le droit de parler ainsi sans ridicule puisque je considère ma beauté comme une arme, non comme un mérite. Mais à quoi me sert tout cela, dis ! A quoi me sert de ressembler à l’Antinoüs que j’ai vu à Florence, et d’être plus riche qu’une galiote d’Espagne venue du Pérou, et d’être auréolé d’une puissance auprès de laquelle la puissance royale n’est qu’un lumignon fumeux ? A quoi bon tout cela, puisqu’elle me hait !

— Bah ! fit Rinaldo, elle vous aimera !

— Elle me hait, Rinaldo ! Elle me méprise ! J’ai vu dans son regard une telle exécration que j’en ai frissonné d’épouvante, un tel mépris que je m’en suis senti écrasé.

— Vengez-vous !

— Me venger ! Me venger ! Je ne rêve qu’à cela. Mais