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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/486

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main, se mit à lire d’une voix haute et grave que des frissons faisaient parfois trembler... Voici ce que contenait la lettre de La Neuville :

 Sire,

Daigne Votre Majesté me pardonner la liberté grande que je prends. Selon vos ordres que m’a transmis M. de Trémazenc de Capestang, chevalier du Roi, le prisonnier doit être tenu au secret le plus absolu et nul ne doit savoir même qu’il est à la Bastille. Sans quoi, sire, je me fusse adressé tout simplement soit à M. le maréchal d’Ancre, soit à M. l’évêque de Luçon, pour savoir quelle attitude je dois garder vis-à-vis de M. le duc de Guise.

Votre Majesté voudra bien convenir, j’ose l’espérer, que M. le duc de Guise n’est pas un prisonnier ordinaire.

M. de Trémazenc de Capestang, qui, par ses ordres, a arrêté M. le duc cette nuit et me l’a aussitôt amené à la Bastille, n’a pu me donner aucun renseignement sur le traitement que je dois faire subir à son prisonnier - ou plutôt au vôtre, sire !

Dans ces conditions, Sire, j’ai l’honneur de prier humblement Votre Majesté de vouloir bien me faire savoir, crainte de quelque méprise de ma part, la manière dont elle entend et ordonne que M. le duc de Guise soit traité à la Bastille.

Votre Majesté me pardonnera-t-elle si j’ose profiter de cette missive pour la féliciter hautement de cet acte de hardiesse qui porte déjà ses fruits, puisque Paris, effrayé, renonce à sa rébellion ? Permettez-moi également, sire, d’exprimer toute mon admiration pour Votre Chevalier, M. de Trémazenc de Capestang, qui a eu assez d’audace pour exécuter cette arrestation, comparable à un fait de guerre de la plus haute importance.

Daigne le Roi agréer l’hommage du dévouement, avec lequel je suis, sire, de Votre Majesté, le très humble et obéissant sujet.

LOUIS-MARIE, BARON DE LA NEUVILLE,

gouverneur royal de la Bastille-Saint-Antoine.

Luynes, Richelieu, Concini, livides tous trois, se regardèrent comme s’ils eussent vu la main mystérieuse de la fatalité tracer devant leurs yeux hagards, en lettres flamboyantes, ce nom qui résonna dans leurs pensées avec un formidable retentissement :

"LE CAPITAN !..."

Notes :


Lorenzo, depuis cette nuit émouvante où il avait conduit Giselle d’Angoulême auprès de Violetta, s’était mis à la recherche de Capestang