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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/507

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releva le duc, et jetant un regard à sa fille éperdue de bonheur, elle prononça mystérieusement :

"Maintenant, le marchand d’herbes du Pont-au-Change est pardonné !..."


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Le jour était venu ; il était environ sept heures du matin. Le duc d’Angoulême, Violetta et Giselle se préparèrent à passer dans leur maison : il n’y avait que la route à traverser. Au moment où le duc donnait son bras à Violetta radieuse, plus jeune que jamais, Giselle l’arrêta par cette question :

"Mon père, vous nous avez dit comment vous êtes sorti de la Bastille, mais vous ne nous avez pas dit le nom de votre sauveur..."

Un nuage passa sur le front d’Angoulême. Que de fois, au fond de sa cellule, il s’était affirmé que sa fille aimait Capestang ! Et à chaque fois, il s’était juré que, lui vivant, sa fille à lui, à lui, un des premiers seigneurs du royaume, ne pouvait devenir l’épouse de cet intrigant, de cet aventurier, de ce fier-à-bras vantard ! Il lui fallait donc avouer maintenant que c’était le pauvre Capitan qui l’avait sauvé ! Jamais !

"Oui, insista Violetta en s’arrêtant, le nom de ce héros, afin que je l’aille remercier à genoux, mon Charles."

Le duc d’Angoulême pâlit. Il regarda tour à tour sa fille et sa femme. Il les vit haletantes. Une seconde, il hésita : puis, secouant rudement la tête :

"Le nom de cet homme ? fit-il sourdement. Plus tard, peut-être ; pas maintenant !"

Violetta demeura interdite. Comment et pourquoi Charles parlait-il avec une sorte de haine inavouée de l’homme qui l’avait sauvé ? Quant à Giselle, toute frémissante, elle ferma les yeux. Un instant, la flamboyante image passa dans son imagination de celui qu’elle avait vu, un jour, un beau jour d’été, dans ces bois de Meudon, se dresser entre elle et Concini. Et tout au fond d’elle-même, Giselle balbutia, éperdue :

""C’est lui ! oh ! c’est lui qui a sauvé mon père !"


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Dame Nicolette fut chargée de faire mettre en état un carrosse de voyage qui, depuis longtemps, attendait à tout hasard, dans les remises de l’auberge : à huit heures du matin, les voyageurs devaient se mettre en route, après avoir pris dans le castel quelques papiers précieux et la somme d’or qui y était enterrée. Le duc, Violetta et Giselle sortirent.

Il est bon de dire ici que la porte de l’antique maison donnant sur la route ne servait que très rarement. Les hôtes du castel, sauf en quelques circonstances exceptionnelles, passaient toujours par le parc : pendant toute la période de conspiration, il avait été en effet nécessaire que la maison passât