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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/521

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Il est maintenant indispensable que nous revenions au pauvre Cogolin, qui avait été si mal reçu par Capestang, auquel, avec un si louable empressement, il apportait le fameux talisman qui faisait gagner une fortune au jeu - la prière écrite par Lorenzo ! On a vu que le cavalier avait préféré se rendormir, après avoir déversé sur la tête de son fidèle écuyer trop zélé toutes les imprécations et toutes les menaces que peut trouver un homme réveillé au meilleur moment de son somme.

Cogolin, donc, avait battu en retraite vers le cabinet qu’il occupait, et qui précédait la chambre de son maître. Tandis que le chevalier de Capestang se rendormait en grommelant, Cogolin se frottait le crâne ; de désespoir, il avait jeté sa perruque dans un coin.

"Vit-on jamais pareil entêtement, pareil dédain de la fortune ! gémissait Cogolin en levant les bras au ciel. Cinq pistoles ! Les cinq dernières pistoles ! Perdues ! Dépensées pour avoir ce talisman infaillible ! Qu’allons-nous devenir ? Il ne reste pas un sol, pas un denier, pas une maille à M. le chevalier. Ah ! l’entêté ! Si seulement j’avais appris moi-même la prière !"

Ainsi se lamentait Cogolin. Bien entendu, il ne songeait guère à dormir. Un temps se passa, une heure ou deux, peut-être. Et Cogolin, toujours inconsolable, soupirait encore après les cinq dernières pistoles données à Lorenzo en échange d’une prière à Mercure, lorsqu’il entendit des allées et venues dans l’auberge endormie.

À ce moment, on frappa.

Cogolin se redressa tout effaré. Pourtant, il alla ouvrir ; c’était maître Garo, le patron de la Bonne-Encontre, et maître Garo disait à Cogolin :

"Éveillez à l’instant votre maître ; il y a ici un gentilhomme qui veut lui parler."

Rendu prudent par la première réception de Capestang, Cogolin allait se mettre à parlementer, lorsque derrière l’aubergiste apparut un gentilhomme enveloppé jusqu’aux yeux dans son manteau. Ce gentilhomme ne dit rien. Seulement, par-dessus l’épaule de Garo, il tendit à Cogolin une bourse pleine d’or, genre d’éloquence qui donna instantanément à l’écuyer de Capestang une dose extraordinaire du courage. Cogolin saisit la bourse, prit une lampe et, tout joyeux, entra dans la chambre du chevalier.