Page:Zévaco - Les Pardaillan - L'épopée d'amour, 1926.djvu/61

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bonnet qui couvrait entièrement la tête jusqu’à la nuque, et Pardaillan demeura stupéfait :

Gillot n’avait plus d’oreilles !…

"Vous voyez bien, monsieur, que vous ne saurez couper ce que je n’ai plus.

— Mais qui t’a ainsi arrangé ?

— Mon oncle lui-même ! Oui, monsieur !… Lorsque Mgr de Damville a su que j’avais trahi son secret parce que j’avais peur que vous me coupassiez les oreilles, il a dit à mon oncle : "C’est bon ! Coupez-les lui !…". Alors, mon oncle, que je n’eusse jamais cru capable d’un tel crime, a exécuté la cruelle sentence, et, tout évanoui que j’étais, m’a ensuite fait porter hors de l’hôtel. Une femme m’a relevé, m’a soigné, a guéri les deux blessures. Et moi, monsieur, moi qui veux me venger, je viens me mettre à votre disposition."

"Tiens ! tiens ! " pensa le vieux Pardaillan.

"Prenez-moi, monsieur. Vous n’aurez pas lieu de vous en repentir. Je vous aiderai peut-être plus que vous ne croyez. Et, contre mes services, je ne vous demande qu’une chose.

— Laquelle ? Voyons.

— C’est de m’aider à votre tour à me venger de Mgr de Damville qui a donné l’ordre de me couper les oreilles, et de mon oncle qui a exécuté cet ordre."


"Voilà un animal qui me paraît animé d’excellentes intentions et qui pourra nous être utile", songea Pardaillan qui ajouta :

"Eh bien ! c’est dit, je te prends à mon service."

Gillot eut dans les yeux un éclair de joie qui eût inquiété Pardaillan s’il l’eût surpris. Mais, faisant signe à Gillot de le suivre, le vieux routier s’enfonçait déjà dans l’hôtel.

Gillot le suivit, en murmurant entre ses dents :

"J’espère que mon oncle Gilles sera content de moi ! ".