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ÉRIC LE MENDIANT.

c’est que la vie, l’amour, ce que c’est que la mort.

— Ceci ne rentre pas dans la chirurgie, mon ami, objecta Horace.

— Ah ! tenez, poursuivit Octave avec un geste de découragement, l’amour est un sentiment triste… J’ai songé bien souvent à me tuer, depuis que j’ai perdu Marguerite. Où est-elle ?… qu’est-elle devenue ?… est-elle morte, elle, morte de honte et de désespoir ? dois-je la rencontrer un jour, ou faut-il que j’use ma vie, ainsi, heure par heure, dans cet isolement qui m’épuise, m’absorbe, et m’enlève à chaque instant un peu de ma force et de mon courage ?…

Horace ne répondit pas… Depuis quelques minutes, un bruit de pas s’était fait entendre derrière eux, et cet incident mit fin momentanément à la conversation.

D’ailleurs ni Octave ni Horace n’étaient bien certains du chemin qu’ils suivaient en ce moment, et ils n’étaient pas fâchés l’un et l’autre d’avoir, à ce sujet, quelques renseignements positifs.

Horace arrêta son cheval.

Par imitation, Octave en fit autant.

Quelques secondes s’étaient à peine écoulées, qu’ils virent poindre, derrière eux, au bout du sentier, la silhouette d’un homme, qui portait le costume du pays.

Cet homme marchait d’un bon pas, et s’appuyait sur un bâton ferré.

La lune était cachée derrière les nuages noirs que le vent chassait de la côte ; mais les pâles rayons qu’elle laissait glisser de temps à autre suffisaient à détailler les parties importantes de son costume.

Il portait le chapeau aux larges bords, l’habit de drap brun des hommes du canton de Saint-Thégonnec, et des guêtres de cuir qui lui montaient à mi-jambes. Cet homme paraissait être encore dans toute la force de l’âge.