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Page:Zaccone - Éric le mendiant - Un clan breton, 1853 .djvu/70

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ÉRIC LE MENDIANT.

ques rayons de soleil se jouaient encore sur les toits bleus du petit manoir.

C’était bien Marguerite !

Mais comme elle avait pâli et maigri, ce n’était plus la blonde et charmante enfant rieuse qu’il avait connue et aimée ; maintenant c’était la pâle et douce image d’Ophélia, pleurant son amour perdu, ou souriant tristement aux rêves de sa raison égarée.

Octave demeura comme frappé de cette transformation, et ne pouvant avancer ni reculer, sans force, sans voix, la poitrine haletante, il laissa tomber sa tête dans ses mains et fondit en larmes.

Et alors, tout son passé revint radieux, rire et danser autour de lui ; toute cette vie heureuse, enchantée, bénie de Dieu, passa devant lui jour à jour, heure à heure, avec ses fleurs et ses parfums, ses chants et ses fêtes.

Il revit la vallée de Saint-Jean-du-Doigt, la ferme du père Tanneguy ; le chemin creux qu’il prenait pour y aller, le sentier rude et rocailleux qu’il suivait pour en revenir.

Comme il était jeune et gai ! Comme il aimait !

Et Marguerite ? la pauvre sainte enfant !

Elle courait alors à travers la prairie, laissant flotter ses cheveux sur son dos ; quelle grâce exquise dans ses gestes ! quelle candeur sur son front ! quelle touchante expression dans son regard !

Dieu n’avait pas d’ange plus pur ; jamais homme n’avait été aimé par un cœur plus naïf !

Octave suivait un à un ces fantômes gracieux du passé, et il les saluait les yeux pleins de larmes et le cœur désespéré.

Tout était fini maintenant. Le vide s’était fait autour de lui ; la solitude, une solitude froide et sans écho l’entourait, et il ne voyait plus de refuge que dans la mort.