Page:Zend-Avesta, trad. Anquetil-Duperron, volume 1.djvu/89

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PRÉLIMINAIRE.


Le Nabab m’attendoit ; on lui avoit annoncé un François qui parloit Perfan. Avant que d’arriver au Dorbar, je traverfai trois cours très-vaftes, remplies d’une multitude de Soldats & de Valets. J’entrai enfuite dans un fort beau Parterre, garni de deux rangées d’arbres & de plattes-bandes avec des rigoles pratiquées pour l’ecoulement des eaux. Au bout etoit une Terraſſe au bas de laquelle je laiſſai mes fouliers, & fis le Sidjdah, portant la main de la terre à mon front. Sur cette Terraſſe etoit le Dorbar, grand Divan, tout ouvert en face du Parterre, & dont un des côtés donnoit ſur le Gange. Ce Divan me parut avoir vingt-cinq a trentepieds en quarre. Lehaut etoit foutenu par plufieurs colonnes couvertes de mouſſeline à fleurs relevee par des glands & par des bandes d’étoffe en or & en argent. On voyoit dans les murailles, enduites d’un maſtic blanc & luifant, une multitude de petites niches qui fe repondoient fymetriquement ; & le parquet etoit couvert de nattes fur lefquelles on avoit etendu un tapis forme de mouſſeline en double & en triple.

Je trouvai le Nabab couché au milieu de ce Divan, le coude appuye ſur un Couffin de Brocard. Il n’avoit ſur la tête qu’un petit bonnet en forme de calotte ; ſon habit etoit de mouſſeline à fleurs, & ſes calecons d^etoffe d’or. Il tenoit un baton d’yvoire termine par une main d’argent avec laquelle il ſe grattoit ſouvent. Ce Prince me parut d’une taille ordinaire : il etoit noir, avoit l’œil vif, & l’air très-ouvert : il n’aimoit pas les Anglois qui l’avoient infulté fous la Nababie de fon Oncle. À ſa gauche, etoient ſes freres, aſſis fur le tapis, les jambes croiſées. Je me placai après M. Law, qui étoit à la droite de ce Prince, & j’avois à côté de moi Mirmaden, Seigneur Mogol, Rajah Doulobram & cinq à ſix autres Rajahs, qui ſeuls pouvoient mettre juſqu’à vingt mille hommes ſur pied. Nos Interpretes etoient derriere nous debout, & les Officiers du Palais, Gardes & autres, formoient le fer à cheval, laiſſant le devant du Dorbar libre.

L’Audience ſe paſſa en complimens & en queſtions ridicules de la part du Nabab, qui paroiſſoit plus occupé de