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Page:Zevaco - Le boute-charge, 1888.djvu/16

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LE BOUTE-CHARGE

triomphant, galopait, exécutait des changements de pied réguliers comme un pas de danse, tandis que deux gardes d’écurie, armés de bridons, couraient à perdre haleine après le fugitif.

Un bourdonnement sourd, confus, indescriptible, composé des mille rumeurs s’exhalant par les fenêtres, d’un va-et-vient continu, me faisait deviner un travail latent dont je ne pouvais soupçonner encore la portée infinie. Tout de suite, j’eus le secret pressentiment qu’il se préparait dans cette sorte d’usine aux dehors ternes et froids quelque œuvre à laquelle des milliers d’ouvriers s’employaient sans relâche, vers laquelle officiers, cavaliers et chevaux tendaient leurs efforts les plus puissants. Et je me sentis saisi d’une fierté nouvelle en songeant que moi aussi, dans l’infimité de ma force, j’allais être le collaborateur de cette œuvre qui se dévoilait à peine à mes yeux étonnés, mais dont je commençais à entrevoir le but grandiose et inéluctable.

Le tableau gris et uniforme de la cour s’en-