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LE BOUTE-CHARGE

Le hussard s’approcha de moi en riant de toute sa large face rousse. Je l’attendis, les bras croisés. Lorsqu’il fut tout près de moi, je fis un pas en arrière, et de toute la force de mon poing, de toute la vigueur de ce que je pouvais avoir en moi de vigoureux, je lui écrasai le visage, sautai sur un des chevaux de trait, et la forge se mit à filer, tandis que le hussard tombait en arrière avec un hurlement, et qu’à l’autre bout du village, la tête de colonne ennemie apparaissait. Comment j’ai ramené la forge au colonel, comment je n’ai pas été tué par toutes les balles de carabine qui me poursuivirent ou par les boulets qui pleuvaient comme d’énormes grêlons de fer, ne me le demandez pas, je ne m’en souviens plus. Je ne m’en suis jamais souvenu.

Tout ce que je puis dire, c’est que je me jetai dans les champs ventre à terre, qu’il me fallut sauter des fossés, enfoncer des haies, que je dus remplacer deux fois mes chevaux fourbus par d’autres qui galopaient au hasard, et que ce fut un vrai miracle pour moi, de