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LE BOUTE-CHARGE

garde, tout prêt à appeler les brigadiers de semaine dont il est la bête noire. C’est généralement un beau gars, grand, bien taillé, de fière apparence sous la crinière rouge, les larges épaules carrément emprisonnées dans les franges blanches, le cordon autour de la poitrine, le revolver au côté, l’instrument flambant sur les reins, il semble attendre le moment d’emboucher la corne pour faire baisser un pont-levis imaginaire.

On le connaît bien. Et suivant les fanfares qui s’échappent du pavillon de sa trompette, on l’applaudit, ou on l’envoie au diable. Une foule de sentiments se soulèvent au vent des notes perlées ou graves, joyeuses ou sévères, qui roulent sous son coup de langue. Il commande le travail et le repos, entonne la marche des événements journaliers. Et je compris la pensée d’orgueil naïf, de triomphe inavoué qui l’agitait le jour où, me montrant son cuivre admirablement fourbi, sans se douter qu’il paraphrasait un mot célèbre, il s’écriait :

— Dire que ceci fait marcher tout cela !