Page:Zo d'Axa - Les feuilles.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Un bourriquet, fils du pays de La Fontaine et de Rabelais, un âne si blanc que M. Vervoort en a mangé gloutonnement, briguait au jeu électoral un mandat de législateur. Le jour des élections venu, ce bourriquet, candidat-type, répondant au nom clair de Nul, fit une manœuvre de la dernière heure.

Par le chaud dimanche de mai où le peuple courait aux urnes, l’âne blanc, le candidat Nul, juché sur un char de triomphe et traîné par des électeurs, traversa Paris, sa bonne ville.

D’aplomb sur pattes, oreilles au vent, émergeant, fier, du véhicule bariolé de ses manifestes — du véhicule à forme d’urne ! la tête haute entre le verre d’eau et la sonnette présidentielle, il passa parmi des colères et des bravos et des lazzis…

L’Âne vit Paris qui le regardait.

Paris ! Le Paris qui vote, la cohue, le peuple souverain tous les quatre ans… Le peuple suffisamment nigaud pour croire que la souveraineté consiste à se nommer des maîtres.

Comme parqués devant les mairies, c’était des troupeaux d’électeurs, des hébétés, des fétichistes qui tenaient le petit bulletin par lequel ils disent : J’abdique.

Monsieur Un Tel les représentera. Il les représentera d’autant mieux qu’il ne représente