Page:Zola - Fécondité.djvu/223

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« Elle qui aimait tant l’existence, partie tout d’un coup, si affreusement… Hier, à cette heure, elle marchait, elle parlait, je la sentais contre moi, je voulais lui acheter un chapeau qu’elle avait vu… Mon Dieu ! puisque j’en étais, pourquoi ne m’a-t-elle pas emmené avec l’enfant ? »

Mathieu dut se décider à le quitter, en le voyant si écrasé, si calme. Il descendit, sauta dans le fiacre qui l’avait attendu. Ah ! quel soulagement de revoir les rues ensoleillées, vivantes de foule, de respirer l’air vif, qui entrait par les deux portières grandes ouvertes ! Au sortir de ces ténèbres immondes, il respirait à pleins poumons le vaste ciel resplendissant de saine allégresse. Et l’image de Marianne qu’il avait hâte de rejoindre, s’était dressée devant lui, comme la promesse consolante d’une prochaine victoire de la vie, d’un rachat compensateur de toutes les hontes et de toutes les iniquités. La chère femme ! elle était donc la bien portante, la vaillante ; que tenait debout l’éternel espoir ! Elle allait donc, même dans la douleur, faire triompher l’amour, élargir l’œuvre de fécondité, travailler à l’expansion, à l’effort de demain ! Et la lenteur du fiacre le désespérait, il brûlait de se retrouver dans la petite maison claire et sentant bon, pour assister au poème de vie, à cette fête auguste de la venue d’un nouvel être, tant de souffrance et tant de joie, l’éternel cantique humain !

En arrivant, ce fut cette gaieté claire de la petite maison qui le surprit. Le soleil y luisait de toutes parts. Il y avait sur le palier un bouquet de roses, qu’on venait d’enlever de la chambre de l’accouchée, et qui embaumait l’escalier. Puis, dès qu’il pénétra dans la chambre, il fut attendri par un luxe de linge blanc, toute une neige de linge, qui foisonnait sur les meubles ensoleillés. Une fenêtre, à demi ouverte, laissait entrer le printemps précoce.

Mais,