Page:Zola - Fécondité.djvu/437

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Deux ans se passèrent. Et, pendant ces deux années, Mathieu et Marianne eurent un enfant encore, une fille. Et, cette fois, en même temps que s’augmentait la famille, le domaine de Chantebled s’accrut aussi, à l’est du plateau, de tous les bois restés en vente, jusqu’aux fermes lointaines de Mareuil et de Lillebonne. Maintenant, toute la partie nord du domaine se trouvait acquise, près de deux cents hectares de bois, coupés de larges clairières qu’un système de routes acheva de relier. Et, transformées en pâturages naturels, ces prairies entourées d’arbres, arrosées par les sources voisines, permirent de tripler le bétail, de tenter en grand l’élevage. C’était la conquête invincible de la vie, la fécondité s’élargissant au soleil, le travail créant toujours, sans relâche, au travers des obstacles et de la douleur, compensant les pertes, mettant à chaque heure dans les veines du monde plus d’énergie, plus de santé et plus de joie.

Depuis que les Froment devenaient des conquérants, occupés à fonder leur petit royaume, en marche pour la plus solide des fortunes, celle de la terre, les Beauchêne ne plaisantaient plus l’extravagante idée qu’ils avaient eue de se fixer à la campagne, des paysans amateurs, des cultivateurs d’occasion, comme ils les nommaient d’abord. Étonnés, acquis d’avance à tous les succès, ils les ménageaient, les traitaient désormais en parents