Page:Zola - Fécondité.djvu/603

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dot, il était ravi d’avoir découvert une femme jolie, très saine, très raisonnable, adroite et sensée, qui serait la compagne, l’aide et la consolation de chaque heure. Avec elle, il ne redoutait pas de surprise, il l’avait étudiée : elle était à la fois le charme, la sagesse, la bonté, tout l’unique bonheur solide d’un ménage. Et lui aussi était très bon, très sage, trop sage, disait-on, et elle le savait, se mettait en route à son bras, heureuse, certaine qu’ils iraient ensemble du même pas tranquille, jusqu’au bout de la vie, sous ce limpide et divin soleil de la raison dans l’amour. La veille du mariage, on fit de gros préparatifs à Chantebled. Pourtant, la fête devait rester intime, à cause du deuil récent. En dehors de la famille, on n’avait invité que les Séguin et les Beauchêne ; encore ces derniers étaient-ils des cousins.

On ne serait guère plus d’une vingtaine, et il n’y aurait qu’un déjeuner. Mais on avait le désir d’être tendres, d’être beaux, et chacun s’ingéniait à trouver quelque tendresse, quelque beauté nouvelle, comme pour resserrer davantage le lien étroit des cœurs. Aussi s’occupait-on de la table, de l’endroit où elle serait dressée, de la façon dont on l’ornerait. Ces premiers jours de juillet étaient si ensoleillés, si chauds, qu’on décida tout de suite de dresser la table dehors, sous les arbres. Il y avait là un emplacement délicieux, devant l’ancien rendez-vous de chasse, le pavillon primitif, habité par les parents autrefois, dès leur arrivée à Janville. C’était comme le nid même de la famille, le foyer d’où elle avait ensuite rayonné sur tout le pays voisin. Ce pavillon, qui finissait par tomber en ruine, Mathieu venait de le faire réparer et élargir, dans la pensée de s’y retirer avec Marianne, en ne gardant près d’eux que Charlotte et ses enfants, lorsqu’il abandonnera prochainement la ferme à son fils Gervais, heureux de vivre de bonne heure en patriarche, en roi descendu