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GERMINAL.

louse sur cette salle si claire, où il y avait même de la coquetterie, des vases dorés sur le buffet, une glace, trois gravures encadrées.

Cependant, la Pierronne était en train de boire seule son café, tout son monde se trouvant à la fosse.

— Tu vas en prendre un verre avec moi, dit-elle.

— Non, merci, je sors d’avaler le mien.

— Qu’est-ce que ça fait ?

En effet, ça ne faisait rien. Et toutes deux burent lentement. Entre les bocaux de biscuits et de bonbons, leurs regards s’étaient arrêtés sur les maisons d’en face, qui alignaient, aux fenêtres, leurs petits rideaux, dont le plus ou le moins de blancheur disait les vertus des ménagères. Ceux des Levaque étaient très sales, de véritables torchons, qui semblaient avoir essuyé le cul des marmites.

— S’il est possible de vivre dans une pareille ordure ! murmura la Pierronne.

Alors, la Maheude partit et ne s’arrêta plus. Ah ! si elle avait eu un logeur comme ce Bouteloup, c’était elle qui aurait voulu faire marcher son ménage ! Quand on savait s’y prendre, un logeur devenait une excellente affaire. Seulement, il ne fallait pas coucher avec. Et puis, le mari buvait, battait sa femme, courait les chanteuses des cafés-concerts de Montsou.

La Pierronne prit un air profondément dégoûté. Ces chanteuses, ça donnait toutes les maladies. Il y en avait une, à Joiselle, qui avait empoisonné une fosse.

— Ce qui m’étonne, c’est que tu aies laissé aller ton fils avec leur fille.

— Ah ! oui, empêche donc ça !… Leur jardin est contre le nôtre. L’été, Zacharie était toujours avec Philomène derrière les lilas, et ils ne se gênaient guère sur le carin, on ne pouvait tirer de l’eau au puits sans les surprendre.